Le dernier article de la série sur les théologies contextuelle avec deux exemples pour le prix d'un.
1. Eco-théologie
i. Contexte
La théologie écologiste se déploie dans le contexte de la crise écologique de la fin du XXème et de la prise de conscience de l’influence de l’action humaine sur les bouleversements climatiques.
Elle émerge d’abord dans des milieux post chrétien proche des spiritualités New Age, le développement de la théologie écologiste va souvent de paire avec une mystique panthéiste. Le rejet du christianisme considéré comme un pilier du monde libérale, destructeur de la nature est constitutif des premiers temps de ce courant.
En milieu chrétien elle émerge d’abord dans l’Eglise orthodoxe qui organise la première journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la création en 1989. Le patriarche œcuménique Bartholomée Ier fait figure de précurseur dans ce domaine. C'est à partir de la Lettre Encyclique Laudato Si du Pape François que la théologie catholique va vraiment s'emparer de la question écologique.
ii. Thèses
La théologie écologiste renferme de nombreuses réalités très différentes. Dans sa globalité elle essaye de penser de manière nouvelle le lien entre Dieu, l’homme et la création, en mettant en avant la responsabilité de l'homme sur l'environnement et l'impact de l'activité humaine sur la création. Si elle veut penser la place de l’homme dans la création, elle s'intéresse aussi à la création comme lieu où Dieu se donne à connaître.
Globalement toutes les théologies de l’environnement s’accordent autour du rejet du projet cartésien qui fonde la modernité : établir l’homme « comme maître et possesseur de la nature ». Sa grande thèse tient dans la formule lapidaire du pape François : tout est lié. L’écologie comme lieu théologique est une invitation à prendre conscience de l’imbrication inextricable de toutes les réalités : naturelles, humaines et divines. On ne peut aimer l’un sans aimer les deux autres, on ne peut rejeter l’un sans rejeter les deux autres.
iii. Appréciation magistérielle
Si le magistère s’est opposé à certaines théories New Age qui ont accompagnées l’émergence de la théologie de l’environnement[1], la question environnementale a rapidement trouvée une place dans les discours des papes.
Déjà chez Saint Paul VI, puis chez Saint Jean Paul II et Benoît XVI la question écologique devient un déploiement naturel de la doctrine sociale de l’Eglise. Mais c’est véritablement le pape François qui installera la question écologique au cœur de la réflexion catholique avec l’encyclique Laudato si (2015), mais aussi avec l’exhortation apostolique Querida Amazonia (2020).
Il est intéressant de noter que, contrairement aux autres théologies contextuelles qui se développent souvent à l’écart du magistère, dans un climat de méfiance mutuelle, l’acte de naissance de l'éco-théologie en milieu catholique est un acte magistériel.
2. Le renouveau pastoral
i. Contexte
Le renouveau pastoral est un mouvement de théologie pastoral qui émerge dans les anciens pays chrétiens en proie à une sécularisation massive particulièrement en Amérique du Nord (Canada et USA) et en Europe occidentale (UK, France). C’est un mouvement œcuménique, qui se développe conjointement dans certaines communautés issues de la réforme et dans l’Eglise catholique. Le contexte est donc celui d’un christianisme en crise dans des nations vieillissantes cherchant un second souffle.
Ce mouvement n’hésite pas à s’inspirer de théorie venant du management (importance du leadership) et de la psychologie moderne (développement personnel).
Trois expériences semblent prépondérantes dans ce mouvement : l’expérience du pasteur Baptiste Rick Warren et de la Saddleback Church de Lake Forest, Californie[2], l’expérience du P. James Mallon, curé de Halifax au Canada, et l’expérience des parcours alpha née dans l’Eglise Anglicane.
ii. Thèses
Si le mouvement du renouveau pastoral est incontestablement porteur d’une certaine théologie il à la particularité d’être porté par des figures qui sont d’abord des praticiens avant d’être des théoriciens. Des pasteurs avant d’être des théologiens. On peut les comparer à des savants fous de la nouvelle évangélisation prêt à tenter des expériences inédites dans des paroisses transformées en laboratoire.
Ce mouvement part du constat que les pays autrefois chrétiens sont maintenant des terres de missions et que les structures ecclésiales héritées du temps où le christianisme était majoritaire ne sont plus forcément adaptées aux enjeux de l’Eglise actuelle. Ils pensent donc l’évangélisation non pas à partir de l’action personnelle de chacun mais à partir de la transformation de la structure ecclésiale.
Leur question n’est pas tellement de savoir comment évangéliser mais plutôt comment transformer les structures ecclésiales afin qu’elles évangélisent. Ainsi ils portent une grande attention aux processus à mettre en place pour permettre la transformation de chaque chrétien en disciple missionnaire et pour transformer chaque structure ecclésiale en structure missionnaire.
iii. Appréciation magistérielle
Le renouveau pastoral en contexte catholique a été très marqué par l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium du Pape François qui entendait réveiller le dynamisme missionnaire et pastoral d’une Eglise repliée sur elle-même et alourdie par sa structure.
Les initiatives pastorales de ce mouvement rencontrent un soutient massifs de nombreux évêques et cardinaux soucieux de cette nouvelle évangélisation. Par exemple le Cardinal Tagle récemment nommé préfet de la Congrégation pour l’Evangélisation des Peuples est un habitué des conférences Alpha. Mais une vraie analyse théologique manque encore sur le fond pour opérer le discernement nécessaire entre les vraies richesses de cette approche et ses risques (perméabilités aux gourous, risques d’abus et d’emprises, fondements intellectuels néo-libéraux etc…)
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