Référence des textes : Jr 1, 4-5.17-19 ; Ps 70 (71), 1-2, 3, 5-6ab, 15ab.17 ; 1 Co 12, 31 – 13, 13 ; Lc 4, 21-30
Chers frères et sœurs,
Vous l’avez sans doute remarqué, dimanche dernier, le texte de l’évangile nous laissait sur un suspens insoutenable. Ce que les créateurs de série américaine appellent un cliffhanger, ce qui signifie littéralement le fait d’être suspendu à une falaise et qui désigne le procédé qui consiste à achever un épisode d’une œuvre de fiction sur un suspens de manière à créer une forte attente pour inviter le spectateur à vouloir voir l’épisode suivant. Et cela a marché puisque vous êtes tous venu aujourd’hui pour entendre la suite de l’histoire.
Rappelez-vous, la semaine dernière nous nous étions arrêtés sur cette parole de Jésus : « aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’écriture que vous venez d’entendre ». Et j’imagine bien que toute la semaine vous vous êtes demandé fébrilement comment cette parole avait elle été reçu, peut être imaginiez vous des guérisons, des miracles et des conversions innombrables qui attestent de la puissance de la parole et de son accueil dans le cœur de ceux qui l’ont entendu.
Mais aujourd’hui le suspense à pris fin, et l’issu a de quoi nous surprendre. Parce que la parole de Jésus est immédiatement suivie de la défiance, du doute, du soupçon et de la haine qui va jusqu’à vouloir le faire périr en le précipitant au bas d’une falaise. Les plus proches de Jésus, ceux qui l’ont vu grandir, qui ont été ses clients lorsqu’il travaillait dans l’atelier de Joseph, qui ont mangé, bu, prié avec lui, sur une unique parole veulent le mettre à mort.
Et cette réaction doit nous interroger car ce sont ceux qui semblent connaître le mieux Jésus qui le rejette avec le plus de violence. Et ceux qui aujourd’hui semble connaître le mieux Jésus c’est nous qui disons être ses disciples, ses frères et sœurs, ses amis.
L’évangile de ce jour nous montre deux mécanismes qui vont entrainer ce rejet de la part des habitants de Nazareth. Et cela peut être l’occasion de les identifier pour les traquer dans notre vie et apprendre à nous en prémunir.
1/ Le premier consiste à se limiter à ce que nous croyons connaître ou imaginons de l’identité de Jésus et de ne pas l’accueillir tel que lui veut se révéler.
De la même manière que les habitants de Nazareth ne voient en Jésus que « le fils de Joseph » et donc ne peuvent accueillir les paroles de grâces et de vérité qui sortent de sa bouche. Si nous enfermons Jésus dans une idée préconçu de qui il est alors Sa parole nous devient inaudible, nous n’entendons que ce que nous voulons entendre, et pas ce qu’il veut nous dire. La parole de Jésus est déroutante, parfois paradoxale, elle peut même nous sembler contradictoire. Il faut toujours nous laisser interpeller, heurter, bousculer, déranger par Sa Parole. Le jour ou ce n’est plus le cas, c’est que nous avons remplacé sa Parole par la nôtre, c’est que nous avons mis notre propre mot dans la bouche du verbe de Dieu pour entendre ce que nous avons envie d’entendre. Alors ce n’est plus le Fils de Dieu fait homme que nous adorons mais une idole à qui nous avons vaguement donné les traits de Jésus.
Pour se prémunir de cela, deux remèdes : la prière et l’étude à l’écoute de l’écriture sainte. L’étude nous met en contact avec la parole de Jésus tel que l’Eglise l’entend, la comprend, l’interprète depuis le commencement, elle donne un fondement objectif à notre connaissance de Dieu : l’enseignement de l’Eglise. Et la prière, particulièrement la liturgie nous met en contact avec l’actualité du mystère et nous permet de découvrir Jésus tel qu’il veut se donner à nous aujourd’hui, ici et maintenant.
2/ Le second mécanisme que pointe le texte est une espèce de jalousie spirituelle par laquelle nous pouvons considérer que les dons de Dieu que nous jugeons les plus excellent nous reviennent de droit sous prétexte que nous sommes ses familiers.
« Nous avons entendu parler des merveilles que tu as faites à capharnaüm, mais chez nous, pour nous, qui sommes tes amis, qu’as-tu fait ? » Cette attitude n’est pas sans rappeler celle du fils ainé dans la parabole du fils prodigue : « ta miséricorde fais des merveilles pour ce traitre, mais moi tu ne m’as rien donné pas même un chevreau ». Nous pouvons être amener à faire le procès à dieu d’être injuste avec nous, de ne pas nous donner les dons dont nous pensons avoir besoins.
Pour nous protéger contre cette tentation, je crois important de rappeler trois choses :
- La distribution des grâces de Dieu dépend de sa souveraine liberté et nul ne saurait réclamer un quelconque droit sur elle. Et Dieu donne à chacun selon ses besoins, c’est par la louange et la gratitude en reconnaissant nos propres dons que nous pouvons sortir de cette jalousie.
- Souvenons-nous de la parabole des invités à la noces, répondons-nous toujours à l’appel du Seigneur quand il veut nous donner ses dons ? Si les hommes se taisent, les pierres crieront
- Il nous faut chercher les dons les plus excellent (cf. 2ème lecture) – le plus excellent de tous c’est la charité. Celui qui demeure dans l’amour du Père n’a besoin d’aucun signe ou prodige, d’aucun miracle. Car qui possède l’amour possède tout.
Ne tombons pas dans ses tentations, laissons-nous posséder par l’amour du Christ pour ne pas rejeter sa paroles et ses dons.
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