Références des textes : 2 M 7, 1-2.9-14 ; Ps 16 (17), 1ab.3ab, 5-6, 8.15 ; 2 Th 2, 16 – 3, 5 ; Lc 20, 27-38
L’évangile de ce jour est un piège pour le prédicateur. En effet la question du mariage concerne la plupart d’entre vous et la réponse de Jésus peut vous étonner et vous laisser dans l’incompréhension. Aussi, si je n’en parle pas je risque de décevoir vos attentes et de vous laisser avec cette incompréhension.
Mais si je décide de vous en parler, alors je tombe dans le piège des Saducéens en me concentrant sur cette question du devenir du lien conjugale au ciel qui, pardonnez-moi de vous le dire n’est ni très difficile, ni très intéressante.
Evacuons donc la question rapidement : vous le savez sans doute, le sacrement de mariage existe en vu d’un double objectif : d’une part l’engendrement et l’éducation des enfants et, d’autre part, la sanctification des époux. Au ciel il n’y a plus d’enfant ni à engendrer ni à éduquer et les époux sont saints. Le mariage à atteint ses objectifs, il n’a donc plus d’objet, plus de raison d’exister. Notez que cela ne dit rien du lien de charité qui continue d’unir les époux au ciel, puisque, comme saint Paul nous le dit, seule la charité ne passe pas.
C’est souvent ce qui nous guette quand nous sommes confrontés à ces textes de l’évangile : Jésus dirait « Laisser passer le chameau et filtrer le moucheron ». C’est-à-dire disserter sans fin sur des questions secondaire en laissant de côté le cœur de ce qui nous est révélé, ce qui est essentiel aujourd’hui pour notre vie.
Or, la controverse que porte les saducéens ne concernent pas vraiment le mariage, ce qui est au cœur de la question c’est la résurrection et finalement cette réalité simple : Dieu nous veut vivant !
Réalité simple, oui ! Cela peut nous paraître, à nous, catholiques blasés, nourri de 2000 de sagesse chrétienne, être un pensum d’une banalité affligeante mais réalisons que cela ne va pas de soi. Les religions païennes et naturels ne professent pas de foi en une résurrection de la chaire ni en une vie éternelle, pas plus que les sagesses orientales et cette affirmation n’apparaît que tardivement dans le judaïsme puisqu’elle est encore débattue à l’époque du Christ.
Bien plus, notre expérience la plus immédiate, la plus évidente est bien d’avantage celle de la mort. C’est la mort qui nous est naturel, qui nous est évidente. La vie est incertaine, hasardeuse, fragile, la mort elle est inéluctable. Tous les couples le savent, certains en on fait l’amer expérience, il est bien plus facile de donner la mort que de donner la vie.
Mais nous portons, nous cette espérance que nul ne peut nous ravir, cette foi que rien ne peut ébranler, cette vérité qui ne souffre aucune contestation. Par-delà la nuit, les doutes et l’ignorance : nous sommes faits pour la vie, car Dieu et le Dieu de la vie. A travers l’horizon de la mort, Il nous à ouvert un passage pour que nous puissions vivre et nous réjouir en sa présence pour toujours.
Finalement, nous sommes, avec cet évangile encore dans la lumière de la toussaint que nous avons célébrés mardi : les béatitudes nous traçaient un chemin, aujourd’hui l’évangile nous indique le but. Notre destination c’est la vie !
Cette révélation ne s’arrête pas là frères et sœurs. Dans cet horizon nouveau que Dieu nous donne nous découvrons finalement notre identité profonde. Parce que nous savons vers quoi nous allons, nous savons ce que nous sommes. Finalement qu’est-ce qu’un homme ? C’est un être qui avance vers la Vie. Les grecs l’avaient perçu de manière mystérieuse dans leur langage. L’homme, étymologiquement, en grec (anthropos), est celui dont « la face est tournée vers le ciel » (et c’est vrai physiquement) et cela doit constamment nous guider. Notre recherche de bonheur ici-bas est en quelque sorte la boussole, qui si elle n’est pas déréglée indique toujours le nord, c’est-à-dire Dieu, notre vrai Bonheur, le Bien Suprême.
Par opposition l’animal est « celui dont la face est tournée vers la Terre ». Notre époque matérialiste et athée en oubliant la vocation surnaturelle de l’homme, son appel à la Vie en plénitude l’avilit et le dépouille de sa dignité profonde. En voulant nous faire croire que ce n’est que sur cette terre que l’homme peut faire son bonheur, qu’il peut faire sa vie, on le ramène au rang de l’animal. Animal que l’on peut alors exploiter, déplacer, avorter, euthanasier… pour peu qu’on lui garantisse un niveau de divertissement suffisant pour lui faire oublier l’absurdité de sa condition.
Car voilà l’épreuve la plus difficile maintenant frères et sœurs, il ne s’agit pas seulement de savoir que nous sommes faits pour la vie et que cela nous donne une dignité inouïe. Il s’agit de vivre comme telle, de vivre en hommes et femmes vivant, et cela implique un certain héroïsme, à l’image de ces martyrs d’Israël. Il s’agit finalement de vivre en s’attachant par-dessus tout à celui qui nous donne la vie. A ne rien aimer d’avantage que celui qui est La Vie, et à considérer toute autre chose dans la mesure où elles nous permettent de nous approcher de lui.
Un autre Martyr, Saint Thomas More a résumé tout cela de manière parfaite : apprenons à aimer en tout temps, comme nous devrions aimer : Dieu par-dessus toute chose, et toutes les autres choses à cause de Lui. Car tout amour qui ne se rapporte pas à cette fin, c'est-à-dire à la Volonté de Dieu, est un amour tout à fait vain et stérile.
Amen
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