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Laisser la place - homélie pour le 22ème dimanche du temps ordinaire (année C)

  • Photo du rédacteur: Clément Barré
    Clément Barré
  • il y a 2 jours
  • 4 min de lecture

Textes du jour : Si 31, 17-29 ; Ps 67 ; He 12, 18-24 ; Lc 14 ,1. 7-14


On a parfois envie de demander à Jésus de quoi il se mêle. Non pas parce que sa parole nous embête (encore que !), mais plutôt parce qu’on se demande si ce n’est pas un peu du gâchis de ressources. Imaginez-vous que le Fils éternel de Dieu, Dieu dans toute sa gloire et sa puissance, est descendu sur terre pour donner aux hommes un cours sur la préséance dans les dîners mondains, digne de Nadine de Rothschild. C’est un peu comme tuer un frelon avec un missile : cela fonctionne bien, mais si monsieur le curé se mettait à utiliser cette méthode pour protéger ses ruches, vous seriez en droit de vous demander si c’est une utilisation rationnelle des ressources à notre disposition. De même, on pourrait se dire : est-ce vraiment pour nous parler de cela que le Verbe s’est fait chair ? Est-ce vraiment là le meilleur usage des quelques années de vie publique de Jésus ? 


On pourrait bien sûr objecter que l’attribution des places dans un repas de mariage n’a rien de secondaire, et que, après tout, si Jésus s’est préoccupé de l’approvisionnement en vin des convives à Cana, il peut aussi prendre le temps de nous donner quelques conseils pour un bon plan de table, qui est un autre souci majeur pour les époux. 


On pourrait aussi ajouter que c’est une des merveilles de notre foi : Dieu s’intéresse au plus petit détail de notre vie. Il a voulu que rien de ce que nous vivons ne lui soit étranger. S’il a pris une humanité, s’il s’est fait l’un de nous, c’est aussi pour nous rejoindre dans tout ce qu’il y a de plus banal, de plus trivial, de plus anodin. Et en cela, il est touchant que Jésus prenne un peu de son temps pour aborder des sujets aussi simples que celui-là. 


Mais, plus profondément, Jésus, comme souvent, utilise un élément à sa disposition, tiré de la vie de tous les jours, pour livrer un enseignement sur son mystère, le mystère de Dieu qu’il est venu nous révéler. Il ne s’agit pas de dénigrer la dimension très concrète de l’enseignement de Jésus. Il ne s’agit pas seulement d’une métaphore, mais bel et bien d’une attitude que nous sommes invités à imiter dans notre vie : ne pas chercher les honneurs vains, faire de la place aux pauvres, etc. Mais il s’agit de comprendre qu’à travers cette leçon très concrète, Jésus nous dit quelque chose de lui-même et de notre relation à lui. 


Car avant de parler de nous, c’est bien de lui qu’il est en train de parler. Qui, sinon lui, s’est pleinement abaissé jusqu’à la dernière place du banquet et s’est vu élevé jusqu’à la première place, jusqu’à être lui-même l’Époux ? Comme le chante saint Paul : « Le Christ Jésus, qui était dans la condition de Dieu, n’a pas retenu jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, mais il s’est abaissé, prenant la condition de serviteur, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné le Nom qui est au-dessus de tout nom » (Ph 2, 6-9). Qui, sinon lui, rassemble de tous les carrefours du monde les boiteux, les malades, les estropiés, les aveugles, etc. ? C’est-à-dire chacun de nous, qui n’étions ni ses amis, ni ses frères, ni ses parents, ni ses riches voisins, mais pour qui il ouvre chaque dimanche la porte du banquet de noces. 


Jésus vient finalement accomplir ce qu’Adam n’a pas su faire : accepter de recevoir sans chercher à prendre, ne pas chercher à s’emparer du don de Dieu, mais lui laisser la place de nous le donner. Adam, par sa désobéissance, avait fermé la porte du paradis ; Jésus, par son abaissement, vient l’ouvrir et fait entrer tous les hommes dans la salle du banquet de noces. 

Quand Jésus nous invite à prendre la dernière place, ce n’est pas par misérabilisme. La vie chrétienne ne consiste pas à s’humilier pour le plaisir. Il nous invite, dans notre vie, à laisser la place à Dieu de venir nous chercher, à laisser Dieu faire, à le laisser nous conduire, nous élever, nous sauver, nous faire entrer dans la salle de noces et nous mener jusqu’à lui. Et cela commence très concrètement, dans notre vie, notre assemblée, dans notre paroisse. 


En conclusion, je voudrais prendre un exemple concret de la manière dont nous pouvons incarner cet Évangile dans notre vie en ce début d’année. Dans une paroisse, vous le savez, il y a un certain nombre de services, de fonctions, de rôles, de places... Beaucoup d’entre vous sont déjà engagés très généreusement dans la vie de la paroisse, d’autres ne le sont pas encore. Si vous êtes invités par un prêtre à occuper une mission dans la paroisse, je vous invite à y voir un appel de l’Église qui veut vous inviter à avancer, à occuper une place nouvelle dans ce banquet de noces et, par-là, à vous rapprocher de l’Époux qui vous appelle auprès de lui. Et si vous craignez cet appel parce que vous vous sentez boiteux, aveugle ou estropié, n’ayez pas peur ! Ce sont eux que le Seigneur appelle à son service. 


Amen. 

 
 
 

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