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Photo du rédacteurClément Barré

Demeurer et voir

Homélie pour le 2ème dimanche du temps ordinaire année B


Textes : 1S 3, 3-10. 19 ; Ps 39 ; 1Co 6, 13-15.17 ; Jn 1, 35-42


Peut-être connaissez vous la bande dessinée « Léonard » qui raconte de manière humoristique les aventures de Léonard de Vinci, authentique génie, qui à chaque planche crée une nouvelle invention : le deltaplane, le téléphone ou la machine à voyager dans le temps. C’est une bande dessinée que j’aime beaucoup et que j’avais l’habitude de dévorer. Le personnage clé de la bande dessinée est le disciple de Léonard. On devrait d'ailleurs plutôt le qualifier de cobaye car c’est à lui que revient la lourde tâche de construire et de tester les inventions du génie qui finissent immanquablement par lui péter à la figure. Le disciple est ici un personnage paresseux, maladroit et un peu simplet.


Lorsque j’ai commencé sérieusement à lire l’Evangile, mon affection pour cette bande dessinée a commencé à me poser problème. En effet je ne pouvais lire le mot disciple sans imaginer immédiatement cette grande andouille, martyrisé par son maître, avec lequel il entretient une relation faite d’admiration, de haine et de besoin mutuel. Et cela connote la compréhension que j’ai pu avoir du mot disciple et me l'a rendu peu aimable.


Et pourtant, nous sommes bel et bien appelés à devenir des disciples du Christ, et l’Évangile d’aujourd’hui et l’occasion pour nous d’approfondir cet appel.


Pour cela, je crois qu’il est bon de commencer par s’arrêter sur la première question que posent les disciples à Jésus, car elle est très révélatrice de ce qu’est véritablement un disciple. En général, dans l’Evangile, quand quelqu’un pose une question à Jésus, celle-ci porte sur son identité « es-tu le fils de Dieu ? » ou bien sur son enseignement « que faut-il faire pour avoir la vie éternelle ? ». Ce sont parfois des questions pièges « Est-il permis à un homme de renvoyer sa femme pour n’importe quel motif ? » qui cherche à le prendre en défaut sur son enseignement et sa fidélité à la loi.


La question des disciples est très différente : « Où demeures-tu ? », le disciple ne cherche pas d’abord des précisions sur son identité ou sur son enseignement. Ce qu’il veut c’est être avec le maître. Le disciple n’est pas un écolier ou un étudiant qui consacre quelques heures par jour à un apprentissage, le disciple vit et grandit dans la fréquentation du maître. Il ne s’agit pas seulement de recueillir un savoir, mais bien de se laisser conduire, élever, transformer par celui qui enseigne.


Ainsi le propre du disciple n’est pas de se réclamer de telle ou telle école de pensée, de telle ou telle sagesse ou partie. Le propre du disciple c’est de fréquenter, assidûment, quotidiennement, inlassablement la personne du maître. Être disciple c’est demeurer avec le maître.


La réponse de Jésus participe aussi de cette dynamique : « Venez et voyez ». C’est un glissement inouï dans l’histoire de la relation entre Dieu et son peuple. Dans l’ancienne alliance, ce qui est demandé au peuple n’est pas de voir mais d’écouter : « Ecoute Israël, le Seigneur ton Dieu est l’unique, tu aimeras etc. ». Le Christ nous fait entrer dans une nouvelle dynamique, un nouveau mouvement. Il ne s’agit plus seulement d’entendre un message, de recueillir une loi, il s’agit d’être témoin d’un mystère qui s’accomplit sous nos yeux. La personne du Christ prend le pas sur le message car la parole de Dieu n’est plus seulement proclamée, elle est incarnée, elle s’est faite chair. C’est une parole qui se voit !


Voir c’est aussi consentir à se laisser voir. Notre regard posé sur Jésus nous expose à son regard à lui. Il se laisse voir de nous pour que nous nous laissions regarder par lui. Comme sur Simon, Jésus pose son regard sur chacun de nous et ce regard vient révéler en nous le mystère de notre vie : ce nouveau nom qu’il nous donne et qui dit notre vocation : tu es Simon, tu t’appelleras Pierre…


Chers amis, puissions-nous en cette année qui commence, devenir toujours plus disciples du Christ. Demeurer avec lui, le voir et nous laisser voir. Nous pouvons le vivre en particulier dans l’adoration eucharistique. En rendant fréquemment des visites au tabernacle. En prenant le temps de nous arrêter auprès de lui.


Le curé d’Ars en arrivant dans sa paroisse fut surpris par un de ses paroissiens qui passait de long moment dans l’Eglise. Il vint lui demander ce qu’il faisait pendant tout ce temps et sa réponse le bouleversa : « Je l’avise et il m’avise », je le regarde et il me regarde. Puissions-nous entrer nous aussi dans cet échange de regard où se révèle le mystère de notre vie. Amen.

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